MISE À JOUR SUR LE MARCHÉ DE LA VANILLE – MAI 2018

Au fur et à mesure que l’une des années de récolte de la vanille les plus difficiles jamais vue (2017) tire à sa fin, il y a raison de croire que malgré certains vents contraires le marché de la vanille pourrait être en transition vers une nouvelle phase de baisse de prix et une amélioration de la qualité. Il reste à voir si nous verrons un déclin en douceur et ordonné, un combat erratique de va-et-vient entre les acheteurs et les vendeurs ou l’effondrement catégorique du marché. Notre perspective, qui n’est absolument pas définitive, se résume comme suit.

Madagascar – “En chute ou non

Nous estimons que la récolte de 2017 au Madagascar a produit environ 1500tm. Bien qu’il y eût une amélioration de la qualité en 2016, au fur et à mesure que la saison avançait la qualité se dégradait considérablement principalement à cause de la combinaison des gousses immatures et l’empaquetage sous vide de gousses insuffisamment séchées et mûries. Tant et aussi longtemps que les pratiques d’empaquetage sous vide de gousses insuffisamment séchées et mûries seront permises, la vanille de Madagascar ne retrouvera jamais sa qualité initiale.  Nous croyons qu’il reste encore plusieurs centaines de tm de vanille invendue sur le terrain, dont la plupart est instable, trop humide et de mauvaise qualité. Une bonne partie de cet inventaire est retenue à des fins spéculatives par des compagnies qui ne sont pas des participants réguliers dans le commerce qui sont maintenant confrontées à un marché potentiellement en déclin. Certaines de ces compagnies escomptent leur inventaire dans le but de liquider avant le commencement de la campagne de la vanille verte de 2018 qui battra son plein à la fin du mois prochain.

La récolte de 2018 sera comparable à celle de 2017 en termes de volume. En raison des conditions climatiques, la floraison vers la fin de 2017 était loin d’être aussi robuste qu’initialement prévue. Actuellement le gouvernement tente de mettre en place une série de contrôles des exportations dans le but de décourager la cueillette prématurée et le vol des gousses vertes. Premièrement, les exportateurs et ceux qui font la cueillette sont tenus d’enregistrer tous les lots de vanille qu’ils veulent exporter après la période débutant le 30 avril jusqu’à la mi-mai.  Deuxièmement, comme c’était le cas lors de la dernière saison, toute nouvelle récolte de 2018 devra être exportée après le 15 octobre.

Il y a des rumeurs qu’une interdiction totale d’exportation de la vanille sera en vigueur à partir du 30 juin, mais jusqu’à présent nous n’avons rien vu d’officiel.

Si exécutées correctement, toutes ces mesures pourraient en fait protéger l’intégrité de la récolte de vanille de 2018 et possiblement augmenter la production mais la réalité est qu’il y a déjà un nombre significatif de vols et de cas de cueillette prématurée de gousses de vanille vertes. De plus, le gouvernement n’a pas encore démontré sa capacité d’exécuter une législation de ce genre.

Encore une fois l’empaquetage sous vide a été un énorme fléau sur la récolte de 2017. D’énormes quantités de vanille partiellement mûrie et séchée ont été empaquetées sous vide tôt dans la campagne.  Comme la récolte était déjà quelque peu immature ces gousses de vanille sont extrêmement instables une fois sorties de l’emballage sous vide. Même si la vanille est stabilisée avec succès le dommage à la qualité de la vanille à cause de l’empaquetage sous vide trop tôt est irréparable.

La campagne des gousses vertes a déjà commencé dans les régions du nord et même s’il est encore tôt les prix initiaux sont quelque peu plus bas que les prix d’ouverture de la campagne de 2017. Il est important de se rappeler que la campagne de 2017 a commencé à peine quelques mois après que le cyclone Enawo a frappé la région de la vanille.  Finalement l’impact sur la récolte de 2017 a été minime mais l’effet sur les prix de la vanille était évident. Actuellement il n’existe aucune anxiété de ce genre dans le marché. Il reste à voir comment les acheteurs réagiront au fur et à mesure que le marché progresse mais à ce stade il y a une tendance vers des prix légèrement à la baisse.

Indonésie – “trop, trop tôt

Malheureusement, la récolte en grande partie a été cueilli trop tôt, ce qui a entraîné une abondance de gousses de vanille de mauvaise qualité avec une très faible teneur de vanilline. Les fermiers craignaient une chute du marché donc les récoltes, en grande partie, ont été faites à l’avance afin de vendre le plus rapidement possible.  Le marché est limité pour la vanille Indonésienne cueilli trop tôt et nous assistons aujourd’hui à une légère baisse de prix dans cette origine également. Nous n’avons pas encore d’idée claire à savoir le niveau de qualité et de prix qui sera disponible en 2018 pour la vanille Indonésienne.

Le marché de la vanille en Indonésie est notoirement spéculatif et nerveux et dans le cas d’un marché fléchissant on peut s’attendre que les exportateurs soient très agressifs avec leurs prix. Nous n’envisageons pas d’expansion au niveau de la production et on s’attend à ce que la taille de la récolte soit entre 100 – 150tm de “vraie” vanille Indonésienne. Nous spécifions “vraie” car jusqu’à récemment plusieurs exportateurs Indonésiens offraient également de la vanille PNG en contrebande en passant par la frontière dans un état insuffisamment séchée et mûrie et finalisaient le processus de séchage et de mûrissement une fois en Indonésie.  Des problèmes de qualité étaient répandus étant donné que la plupart des exportateurs étaient incapables de stabiliser la vanille PNG. Pour le moment le gouvernement PNG a pris des mesures autoritaires en ce qui concerne la contrebande frontalière et nous croyons que ce sera bénéfique pour les deux origines à long terme.

Papouasie-Nouvelle-Guinée – “nous sommes numéro 2”

La production de la vanille PNG a connu une expansion impressionnante durant la plus récente crise de la vanille et le gouvernement semble finalement réaliser la valeur que la récolte contribue à l’économie. D’où les mesures nécessaires pour contrecarrer la contrebande en Indonésie dont nous avons fait référence précédemment. Il y a une forte demande pour la vanille gourmet de PNG et on voit également des percées dans le marché d’extraction, quoiqu’à une beaucoup plus petite échelle que la vanille bourbon. Bien que PNG produit un peu de vanille type Planifolia nous pensons que le produit Tahitensis a beaucoup plus de potentiel étant donné que le profil de saveur et de parfum est complètement unique à cette origine. Malgré le fait que la vanille Planifolia peut être visuellement impressionnante, la saveur et le parfum sont habituellement très faibles et elle n’est pas correctement séchée et mûrie.  La vanille PNG occupe une place prépondérante dans les secteurs de plus en plus importants des services d’alimentation et de détails pour la vanille ce qui n’est pas surprenant étant donné une différence de prix d’entre 150.00 – 200.00/kg USD FOB quand on compare à la vanille gourmet en provenance de Madagascar.

Comme dans d’autres régions en croissance, la récolte avant maturité et la vanille immature ont contribué au problème de la mauvaise qualité. Cependant, les fermiers locaux et les exportateurs sont de plus en plus conscients de cette situation et nous voyons un peu d’amélioration sur le terrain à cet effet. Actuellement il y a une quantité significative de vanille PNG qui arrive sur le marché et nous prévoyons une production allant jusqu’à 250tm de gousses de vanille mûrie et séchée correctement en 2018. Ce qui placerait PNG comme étant le deuxième plus grand producteur de vanille après le Madagascar à l’échelle mondiale.

Ouganda “stabiliser le marché”

La vanille ougandaise a sous-performé misérablement durant la crise mais en 2018 il y a de l’espoir depuis l’intervention du gouvernement avec des mesures qui visent à réformer l’industrie. La vanille de qualité très médiocre et la production impuissante font en sorte que l’Ouganda est en retard par rapport à ses concurrents. Maintenant avec les mesures en place pour prévenir la cueillette précoce et minimiser les vols nous sommes optimistes que nous verrons une amélioration pour les prochaines récoltes (mai et novembre) comparativement à 2017. C’est encore “un travail en cours” et ce serait irréaliste à notre avis de s’attendre à ce que la production combinée des deux récoltes dépasse 75tm – 100tm.

Comores -­ crème de la crème”

Même si la production ne dépasse pas encore 100tm, les îles des Comores produisent actuellement la meilleure qualité de vanille bourbon. Un secteur en croissance relativement petit et des contrôles gouvernementaux rigoureux contribuent à obtenir une récolte relativement mature avec un minimum de vols et de perturbation.  Il y a une campagne agressive entamée afin d’augmenter la production de la vanille dans le but de doubler le tonnage d’ici 2020. Nous prévoyons également des prix légèrement à la baisse aux Comores.

Polynésie française – occasion manquée”

Il n’y aucun doute que l’authentique vanille Tahitienne est de qualité supérieure et une des vanilles les plus convoitées, le plus souvent utilisée dans les secteurs de service d’alimentation et de parfum. Étonnamment, malgré des conditions de marché extrêmement favorables la production de la vanille de la Polynésie française a diminué et les prix ont augmenté à des niveaux que l’on ne peut qualifier que totalement insoutenable.  Malheureusement, le marché d’exportation est contrôlé par seulement quelques exportateurs qui entre eux établissent des prix qui leurs conviennent en se concentrant sur les marges de profit au lieu de l’augmentation de la production et la part du marché. À moins de modifier cette tendance, la vanille de la Polynésie française ne s’élèvera jamais plus haut que son statut de “créneau”. Il est peu probable que la production de 2018 dépasse 25tm.

Questions sociales – “les dangers qui nous guettent”

La situation actuelle du marché de la vanille cause d’innombrables problèmes au Madagascar et dans d’autres régions en croissance. Vols à main armée, incidents d’auto-justice dans la campagne où les voleurs sont tués sur place quand ils sont pris à voler de la vanille, copinage politique, etc.  Lorsqu’un kilo de vanille se vend pour l’équivalent du salaire annuel moyen d’un travailleur typique de Malgache ce n’est pas difficile de voir comment la tentation survient et que des éléments désagréables peuvent être attirés par le commerce. Les fermiers de la vanille et leurs familles sont forcés de prendre des mesures extrêmes afin de protéger leurs récoltes de vanille. Si et lorsque les prix retournent à des niveaux plus raisonnables on s’attend à une forte diminution de ces évènements regrettables.

Conclusion – “est-ce véritablement la fin”?

Pour être très clair en aucun cas nous prévoyons la fin des prix élevés de la vanille. Même si les prix de la vanille diminuaient de la moitié, ce qui est extrêmement peu probable à court terme, ils seraient encore à des niveaux historiquement élevés. Nous sommes persuadés que le marché de la vanille a atteint un sommet étant donné que la production de la vanille a suffisamment approvisionné la demande mondiale qui était à la baisse depuis plusieurs années. Cela est confirmé par le fait des relativement grandes quantités de vanille invendue, pour la plupart de mauvaise qualité toujours sur le terrain au Madagascar. À notre avis plusieurs choses doivent se manifester afin que la tendance de prix à la baisse prenne de l’essor.

  • Le gouvernement doit être modérément efficace dans leurs efforts de contrôler la cueillette précoce et la récolte de 2018 au Madagascar.
  • Les acheteurs internationaux, incluant cette compagnie, ne doivent pas préfinancer excessivement leurs achats étant donné que cela contribue à des problèmes de qualité et de prix.
  • Le mûrissement accéléré et l’extraction de gousses de vanille vertes doivent être fortement règlementés afin d’éviter de mettre de la pression excessive sur les prix des gousses de vanille vertes et d’affecter négativement le moyen d’existence de milliers de travailleurs de la vanille au Madagascar.
  • L’empaquetage sous vide de la vanille doit être carrément banni avant le 1er janvier, 2019 dans le but d’obliger les fermiers et travailleurs qui font la cueillette de mûrir et sécher correctement la vanille. Après la cueillette prématurée, l’empaquetage sous vide de vanille semi-mûrie et séchée a un impact le plus négatif sur la qualité et le rendement de toutes récoltes de vanille. Bannir l’empaquetage sous vide exigerait un effort largement concentré de la part des autorités locales que nous n’avons jamais vu au Madagascar,
  • Avec les élections présidentielles prévues cette année le pays doit demeurer relativement stable.

Dans aucun cas un ralentissement immédiat est une certitude, si l’exportation est bannie catégoriquement à la fin de juin cela pourrait causer une pénurie à court terme pour les acheteurs qui n’ont pas bien évalué leurs besoins jusqu’au 4ième trimestre de 2018 lorsque l’exportation de la récolte de 2018 commencera. Une attitude trop prudente peut donner lieu à des opportunités manquées.

FEMA – L’association des producteurs de saveurs et extraits

Après des années d’hésitation et de délais FEMA a finalement publié un article sur les règlements de la FDA concernant l’étiquetage d’arômes de vanille et des aliments à saveur de vanille aux États-Unis dans l’édition la plus récente de la revue spécialisée ‘Perfumer and Flavorist’ (Parfumeurs et aromaticiens). Nous avons joint une copie de l’article mentionné et malgré la longueur du texte cela constitue une lecture très intéressante si votre compagnie fabrique des produits à saveur de vanille. Nous avons surligné ce que nous considérons être les points saillants. Cet article sera également affiché dans notre site web au www.austhachcanada.com

 

 

Aust & Hachmann (Canada) Ltd/Ltée